Article paru sur L’info Durable
Alors qu’un projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire est en cours, zoom sur deux acteurs ardéchois de ce modèle qui présente plus d’un avantage.
Aujourd’hui et depuis des années, nos modes de production et de consommation reposent sur un système linéaire en trois étapes : produire, consommer et jeter. Sauf qu’agir ainsi n’est pas sans conséquence sur l’environnement puisqu’en produisant on épuise non seulement nos ressources naturelles, mais on pollue en transformant ces ressources en produit, et encore plus en jetant quasi-systématiquement tout ce que nous consommons. À cette économie linéaire, on oppose l’économie circulaire qui depuis quelques années tend à se faire un chemin. L’idée est de repenser nos modes de production et de consommation en optimisant l’utilisation des ressources naturelles et ainsi limiter les déchets générés. C’est par exemple pratiquer le covoiturage ou encore donner une seconde vie aux objets comme le fait très bien la ressourcerie Trimaran, installée à Privas et aux Ollières.
Donner une seconde vie aux objets
Née en 2012, cette ressourcerie collecte, sur ces deux sites, 80 à 90 tonnes d’objets par an. Des apports faits majoritairement sur site par des particuliers qui « se débarrassent » d’objets dont ils ne veulent plus, mais aussi directement chez des particuliers (ou des entreprises) qui veulent vider des lieux. « C’est souvent lors d’un changement de situation dans la famille que les gens viennent nous voir, constate Yves Bazin, le président de cette ressourcerie. Un parent qui décède et il faut vider la maison, un enfant qui s’en va et on veut se séparer de vieux meubles… » Tous ces objets donnés, la ressourcerie les nettoie, les répare si besoin, et les met en vente dans ces deux boutiques de Privas et des Ollières. « Nos clients, ce sont des gens avec des petits moyens car nous pratiquons des petits prix, mais aussi des gens sensibles à la réutilisation et qui viennent chez nous en 1er réflexe quand ils ont besoin de quelque chose plutôt que de filer acheter du neuf. » poursuit Yves Bazin qui voudrait développer encore un peu plus ce type de clientèle.
Trimaran pousse sa démarche d’économie circulaire encore plus loin en proposant des ateliers d’auto-réparation au grand public. Sur le petit électroménager avec le Repair’café qui se tient une fois par mois, mais aussi sur les vélos. « On montre comment réparer et on propose les pièces à prix coûtant que nous avons préalablement récupérées sur des objets donnés. » explique Yves Bazin. Trimaran a également développé un atelier maroquinerie dans lequel ses salariés travaillent à la réutilisation du cuir. « Nous avons récupéré tous les anciennes vestes en cuir des pompiers de l’Ardèche, ainsi que celles d’une caserne de Villeurbanne, et avec ça nous avons créé des sacs, des trousses, des porte-cartes… que nous vendons dans nos boutiques. Mais pour cette activité, nous préférerions travailler sur commande et nous devons mieux nous faire connaître auprès des collectivités et des entreprises qui auraient des besoins. » Un objectif sur lequel la ressourcerie ardéchoise va travailler avec l’agrandissement de ses locaux privadois (qui vont passer de 400 à 900 m2 courant 2020), tout comme à la création d’un nouvel atelier du même ordre mais autour du bois. Avec comme ambition de décaper et relooker de vieux meubles pour qu’ils trouvent acheteurs et éviter qu’ils ne partent au recyclage. Et pour la maroquinerie comme pour le bois, l’idée sera d’ouvrir des ateliers au grand public pour qu’il puisse donner une seconde vie à de vieux objets.
Recycler et réutiliser
Même démarche mais à un niveau plus industriel avec l’entreprise Secondly installée à Flaviac, dans les anciens locaux des matelas Simmons. Ici ce sont de vieux matelas qui sont collectés (environ 200 000 par an), démantelés et mis en balles pour être revendues tel quel ou débarrassées. Et là aussi Secondly a choisi d’aller plus loin dans la démarche en développant une plaque de mousse réalisée à partir de ces matelas recyclés et réutilisables pour de la literie. « On a mis 12 mois pour sortir ce produit, il faut maintenant qu’on trouve un gros distributeur qui veut nous suivre », explique Timothée Coisne, fondateur-dirigeant de cette société née en 2012 dans le nord de la France et venue installer un 2e site en Ardèche pour étendre son périmètre géographique et bénéficier de l’outil de production en place pour fabriquer ses propres matelas éco-conçus. Et si Secondly communique encore peu sur cette activité, elle vend pourtant déjà ses propres matelas : « on travaille uniquement sur rendez-vous car on n’est pas adapté pour recevoir du public, mais on a vendu pas mal dans la vallée et le bouche-à-oreille a bien fonctionné. La literie c’est pourtant quelque chose qui touche à l’intime et certains ont un frein à s’équiper avec du recyclé. Mais quand on leur explique comment on travaille, les inquiétudes sont levées et c’est même un plus pour eux de participer à cette économie circulaire. » explique Timothée Coisne.
Une économie porteuse d’emplois
Des acteurs de l’économie circulaire, il y en a évidemment bien d’autres en Ardèche. Et ils sont nombreux à intégrer le volet réinsertion par l’emploi dans leur engagement. Chez Trimaran par exemple, c’est une équipe de 17 salariés en réinsertion qui travaillent quotidiennement sur les différentes activités de la ressourcerie. « Ce sont souvent des bénéficiaires du RSA, qui nous sont adressés par l’État (Direccte). Ils sont chez nous pour une durée de 6 à 24 mois maximum. Chez nous ils reprennent une activité professionnelle et construisent un projet de retour vers l’emploi. » explique le président Yves Bazin.
L’économie circulaire est donc un excellent moyen de lutter contre le gaspillage, de protéger notre environnement, de préserver notre porte-monnaie et de participer à la réinsertion de personnes en difficulté. On aurait tort de ne pas s’y mettre non ?